mercredi 17 septembre 2008

En aparté.

La pêche de la carpe a ce pouvoir de nous transmettre des émotions fortes: elle peut nous emmener dans un sentiment de puissance comme dans le doute ou la frustration la plus complète.

Après une session réussie, une simple pêche peut nous rendre euphorique avec, au fond de nous, la certitude que nous pêchions au plus juste. A ce moment précis, plus rien peut nous arrêter: notre technique, nos appâts ainsi que les spots choisis sont alors, à nos yeux, les meilleurs du plan d'eau. Aussi, l'admiration que peut susciter le regard des néophytes sur le défilé de carpes avantageusement photographiées amplifie notre sentiment de supériorité halieutique.


Aussi une semaine plus tard, nous revenons au même emplacement, en utilisant la même technique afin de concrétiser l'exploit et transformer ainsi "l'extra" en "ordinaire". Et là, ohhh surprise, les détecteurs restent muets. Que s'est il passé? Les appâts étaient pourtant pêchables, le vent en notre faveur, les températures régulières, les hameçons affutés et la pression de pêche plutôt modérée. Après maintes remises en cause, il advient que nous ne contrôlons uniquement que certains paramètres de la pêche. Pourquoi l'euphorie de la semaine dernière n'est pas réitérée? La lune, le Ph de l'eau, le changement de nourriture naturelle? A part certains pêcheurs scientifiques qui trouvent toujours une justification à leurs échecs, moi je n'y arrive pas. Sachez seulement que ces pêcheurs là devraient plutôt anticiper que d'analyser les capots successifs.

Cette année, en Vendée et d'ailleurs sur l'ensemble du grand ouest, la pêche de la carpe se trouve très difficile. Les raisons, je ne les connais pas. Il semblerait qu'il y ait eu trop de pluie en début d'année. Ensuite, a priori, les mois de mai et juin ont été entrecoupés par des chutes de températures, ce qui empêche une fraye réussie de nos cyprins. Les poissons se trouvant avec oeufs et laitances ont l'appétit coupé. Fut suivi un été maussade quand pratiquement aucune journée n'a été épargnée par la pluie; même si la température de l'eau a baissé, les poissons ne se sont pas alimentés plus qu'un été chaud. Encore, la nourriture naturelle a été plus abondante que les autres années; la prolifération des vers de vase en sont l'exemple même. Enfin, pas de bol cette année, nous avons treize lunes dans le calendrier. Au dire des anciens, une année comme celle ci n'est pas fructueuse pour la pêche. Le moral de l'ensemble des pêcheurs est au plus bas et ça se vérifie quant à la désertion des secteurs de nuits très fréquentés habituellement.


La dernière émotion forte que procure la traque de la carpe est la frustration: Nous avons tous vécu ce sentiment en revenant d'une session.
Matthieu et moi n'avons que très peu de temps pour pêcher dans l'année, notre emploi du temps étant déjà très chargé. Il est important pour nous de mettre le maximum de moyens pour réussir ce peu de temps de pêche. Et pourtant, les résultats ne répondent pas toujours à l'engagement et la préparation de la session. A part les incertitudes de la pêche, d'autres facteurs inattendus peuvent jouer sur notre moral:

- Deux jours de roulage de bouillettes puis deux semaines d'amorçage: arrivé sur les lieux, le poste convoité est occupé par des crabes qui avaient remarqué notre manège: colère.

- Autre exemple, nous avons réservé dernièrement un poste pour quatre jours dans un privé. La Vendée ne possédant que très peu de grosses mémères, nous décidons de pêcher un lac du centre de la France. Même si la pêche des gros poissons n'est pas notre quête ultime, en toucher quelques un dans l'année fait du bien. Sur ce lac, un poisson sur trois dépasse les quinze kilos. . La pêche commence et les départs s'enchainent. Au total nous sortiront 15 poissons sans passer une fois la barre des quinze: Une chance sur 54 de tomber sur cette combinaison: frustration.

Aussi, la dernière nuit, deux pêcheurs rejoignent le poste d'à côté, lancent ou la ligne veut bien aller et amorcent copieusement avec un sac de 25kg de bouillettes jaunes type décathlon. Vingt minutes plus tard, ils sortent un poisson de 19 kg devant nos yeux exténués.

Relativisons:
Ces deux dernières émotions, je les ai vécu intensément dans chacun des cas et je suis sûr de les revivre dans les prochaines sessions. Les doutes seront omniprésents. La frustration surviendra et cassera des semaines de préparation. "Tu n'as qu'a en faire moins et tu ne seras pas déçu" me lance ma femme. Elle a raison mais si j'en fais moins alors le doute m'envahira de plus bel. Alors que faire??? la réponse est simple: continuons de rêver: n'est ce pas le rêve de la prise d'un poisson extraordinaire qui nous permet de surmonter les échecs et avancer? Un jour, ce sera mon tour. Et comme le dit si bien la française des jeu: "100% des gagnants ont tenté leur chance"